HISTOIRE COURTE
 

 

_De où ? Gatecrick ? Je ne connais pas. La ville la plus proche d'ici, c'est Fortson, et il faut bien cinq jours pour y aller à pied...
_ Cinq jours ? Mais...
_ Ecoutez, reposez-vous encore cette nuit, et demain, nous verrons si on peut sortir la voiture. Je vous laisse à manger sur la table. Je vous préparerai un vrai gros déjeuner quand il fera jour. Ça va vous requinquer, vous verrez.
_ Merci, vraiment... Vous n'êtes pas obligée, vous savez ?
_Oh, je sais, mais de toute façon, je saurais me défendre si vous n'étiez pas le gentil étranger que je crois voir en vous...

Souriante, elle monta les escaliers étroits. Trout conversa avec lui-même :

_ Je ne l'ai pas rêvé, cette ville. Et l'hôtel. Et... Mes livres ? Mais si, bien sûr ! Ça ne pouvait être qu'un rêve !

Les réponses étaient donc arrivées. Soulagé, II s'emmitoufla un peu plus sous sa couette et se rendormit bientôt. Soulagé, oui, mais avec ce goût amer d'un joli rêve qui s'efface devant la trop plate réalité.
Il se réveilla dans la nuit, poussé par la -très- pressante envie d'aller aux toilettes. Ses jambes engourdies le traînèrent jusqu'à l'escalier, d'où il vit la

 

porte entrouverte de la précieuse caverne. Il s'y installa, notant la bonne idée qu'avaient eue les bâtisseurs de l'endroit de faire passer le tuyau de chauffage juste à côté de la cuvette. D'un coup, c'était plus confortable. Trout remarqua un livre posé contre le mur. Se pouvait-il que... Anxieux, il s'en saisit, et respira profondément avant de le regarder. Mais il ne s'agissait que d'un gros recueil de mots fléchés. Rien de mystérieux. Il le replaça le plus fidèlement possible. Il s'agissait que la femme ne croit pas qu'il avait fouillé la maison pendant la nuit...
A la lueur du jour, le feu vivait encore, dans la cheminée, le vent soufflait toujours dehors. Son hôtesse était déjà debout quand il s'éveilla, en train de préparer le fameux petit déjeuner dont l'odeur avait tiré Trout de son sommeil. Elle était sous deux ou trois robes de chambre trop grandes pour elle. La température dans le chalet avait baissé avec l'intensité du feu.

_ Vous voilà réveillé ? Vous allez pouvoir manger un morceau, alors...
_ Bien volontiers, madame. Je meurs de faim !
_ Après avoir failli mourir de froid, ça serait dommage. Mais appelez-moi Claudine, je vous en prie.
_ Ah, bien. Moi, c'est Terry Trout. Excusez-moi de ne pas m'être présenté avant.
_ Vous pouviez à peine parler, et vous déliriez à moitié... Et que faisiez-vous perdu en pleine tempête, monsieur Trout ?
_ Je... Je suis écrivain et... Non, je suis à la retraite, en

 

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