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QUELLE
VERITE POUR MONSIEUR TROUT ?
PARTIE I : Le dernier livre.
« Sa mère n'était plus là, le lit était
fait, comme il a toujours été fait, chaque matin par elle,
son bureau bien rangé, son beau miroir bien propre, souvenir de
Venise, et sa brosse retenait encore quelques cheveux blonds au temps
de l'oubli. Il la revoit encore se la passer dans la longue natte alors
qu 'il récitait sa poésie pour le contrôle hebdomadaire
du lendemain. Comme chaque soir depuis l'accident, il la revoit, assise
à côté de la lampe de chevet à la lumière
chaude, dessinant les détours de sa peau fraîche sur le mur
sombre, seule et silencieuse, comme dans un tableau de La Tour. Combien
de temps encore se postera-t-il là, sur le pas de la porte de la
chambre où sa mère rêvait la nuit venue, où
le bruit de la brosse démêlant les cheveux lui semblait plus
chaleureux encore que la respiration rassurante d'un feu de cheminée
? Quand se dirait-t-il pour la dernière fois que ce temps est passé
avec le départ de maman ? Que ces souvenirs doivent suffire à
la faire vivre dans le parcours même de sa descendance ? Que la
nostalgie n 'est que l'excuse de ceux qui ne peuvent assumer ?
FIN. »
Il ferme le livre et les yeux.
Ah ! Maman ! Ils t'ont bafouée. Ils ne t'ont jamais reconnue !
Ah ! Papa, tu avais raison. Toi non plus, tu ne l'as jamais reconnue !
Comme tu ne m'as jamais
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reconnu.
Je ne t'ai pas écouté, mais tu avais raison. C'est pourtant
ce que je voulais faire. Je voulais être un artiste, être
connu ! Maman l'avait compris, mais même celui où je lui
rends hommage, mon chef d'oeuvre...Mais ils ne l'ont pas diffusé.
Pauvre maman. Elle le méritait, pourtant. Et je le méritais
aussi. J'aurais pu avoir du succès. Si seulement les gens n'aimaient
pas que de la merde ! Personne pour me rendre compte de mon talent.
Il pose le livre devant lui et le fixe.
_Peut-être
finalement n'ai-je aucun talent. Oui, tu as raison, papa. Il est temps
pour moi de dépenser le peu qu'il me reste pour faire fortune ailleurs.
Comme toi, papa. Je vais aller là où tu es allé.
Tu dois y être bien, puisque tu n'es jamais revenu. Plus rien ne
me retient ici, maintenant. Je viens faire fortune. Je viens, papa.
La
coiffe ébouriffée par sa passion, les rides plus creusées
qu'a l'habitude, il se lève enfin et quitte cette table de cuisine,
dans la pénombre à présent. Depuis le matin qu'il
était assis là, à relire son dernier ouvrage. Les
dernières pages ont davantage été lues par ses souvenirs
que par ses yeux, tant la lumière incomplète de l'éclairage
publique s'essouffle en passant par la fenêtre sale.
C'était le dernier. Dernier essai. Dernier effort. La quantité
gargantuesque de livres, de pages, de mots et de lettres amoncelées
pendant toute une vie n'aura d'égale que la déception de
son créateur. « Maman » était le dernier. Dernier
essai. Dernier effort. Peut-être le titre.. ? Mais le titre n'y
change rien. C'est un bon livre. |
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